Les algues représentent aujourd’hui une industrie en plein essor, présente dans une cinquantaine de pays et représentant près de 50 % des productions aquacoles. Le plus grand marché des produits à base d’algues est celui de l’alimentation humaine [1]. Cela est dû à l’ampleur de la consommation des algues en tant que « légumes » dans les pays asiatiques (Chine, Corée, Japon) ; mais aussi grâce à leur utilisation par l’industrie des texturants, représentant plus de 80% en Europe [2]. Les principaux texturants commercialisés sont, par ordre décroissant, les carraghénanes, les alginates et l’agar. Leur demande est de plus en plus forte du fait de leur faible coût.
Ces texturants sont des fibres : ils constituent la majorité de la paroi des algues et leur permettent de retenir l’eau, de résister dans l’environnement marin ou encore de fixer les minéraux.
Les alginate, les carraghénanes et l’agar sont valorisés dans l’agroalimentaires pour modifier les propriétés rhéologiques des solutions auxquelles ils sont incorporés, allant de l’épaississement à la gélification. Leurs propriétés sont intimement liées à leur conformation.
Les carraghénanes
Ils proviennent d’algues rouges tropicales (principalement les espèces Eucheuma et Kappaphycus), et dans une moindre mesure, les espèces Chondrus et Gigartina que l’on trouve dans les régions tempérées, notamment en Bretagne [3]. Les carraghénanes sont extraits de ces algues par des procédés chimiques : le code additif E407 leur est alors attribué.
Ils sont solubles dans les préparations aqueuses dès lors qu’elles sont chauffées. En refroidissant, ces préparations vont s’épaissir sous leur action.
Ceux-ci présentent une synergie avec les protéines, et particulièrement avec celles du lait et de la viande, le calcium, les amidons et certaines gommes (caroube, konjac, tara). On les retrouve donc pour épaissir ou stabiliser les préparations laitières (crèmes glacées, fromages à tartiner, desserts laitiers). Mais également, on les utilise pour fixer l’eau dans les produits charcutiers (jambon, saucisses) et pour épaissir les préparations végétales (boissons, crèmes, desserts).
Les alginates (ou acide alginique)
Ce sont des espèces d’algues brunes que l’on trouve dans les régions tempérées. Les alginates sont les plus intéressantes pour être exploitées. En Bretagne, la production industrielle extrait les alginates à partir d’algues brunes de type laminaires ou fucales par un lavage à l’acide, une série d’étapes chimiques s’en suit pour les purifier.
Les alginates sont utilisés comme gélifiants, épaississants et stabilisants dans une large gamme de produits alimentaires sous les codes E400 à E405. Les principaux alginates commercialisés sont sous forme de sels de sodium et sont répartis entre alginates gélifiants et épaississants en fonction de leur structure chimique [3].
Contrairement aux carraghénanes, les alginates extraits sont solubles à froid et confèreront une texture davantage crémeuse que gélifiée. Par exemple, ils vont alors être utilisés pour apporter de l’onctuosité aux crèmes desserts laitières (pasteurisées, stérilisées ou glacées), aux produits tartinables (rillettes de poissons, tarama, guacamole) et aux préparations à base de fruits (confitures, pâtes à tartiner, pépites de fruits).
L’agar
L’agar est également extrait d’algues rouges tropicales, des genres Gracilaria et Gelidium. C’est un additif codifié E406, le plus connu du grand public car il est vendu en aide culinaire dans de petits sachets. Il constitue la principale alternative végétarienne à la gélatine animale, néanmoins la texture procurée sera une gelée ferme.
Cette texture sera recherchée pour épaissir les préparations laitières (panna-cotta, crèmes épaisses, flans) et végétales. Sa bonne compatibilité avec le sucre permet son utilisation dans les confiseries, les compotes, les glaçages et fourrages des gâteaux.
Alternative Clean-Label : focus sur le Lichen
Le Lichen (Chondrus crispus) est une petite algue rouge, elle contient donc des carraghénanes. D’ailleurs en Bretagne, elle est traditionnellement infusée dans le lait pour épaissir les desserts. Cette algue est récoltée à la main. Puis elle est exposée au soleil, ce qui permet de la blanchir afin de la rendre plus neutre en couleur. En fonction de son application finale, le Lichen est ensuite réduit en paillettes ou en poudre fine.
Riche en carraghénanes, le Lichen est recommandé pour les mêmes applications que les carraghénanes extraits. On peut les utiliser dans les produits charcutiers, les produits laitiers et leurs alternatives végétales. Sous forme de paillettes, son emploi est réputé comme auxiliaire technologique pour la clarification de la bière.
Néanmoins, à la différence des carraghénanes extraits, cette algue n’est pas classée comme un additif. En effet, son procédé de fabrication est naturel et c’est bel et bien l’algue entière qui est utilisée. Ainsi, en plus de la fonction texturante du Lichen, l’application alimentaire bénéficiera de ses apports nutritionnels : des fibres, de l’iode et des oligo-éléments.
BIBLIOGRAPHIE :
[1] FAO. – The State of World Fisheries and Aquaculture 2016. Contributing to food security and nutrition for all. Rome, 200 p. (2016).
[2] MARFAING H. La place des algues dans l’industrie agroalimentaire aujourd’hui – CEVA – 30/10/2019.
[3] ZUBIA M, MATTIO L. Macroalgues tropicales : une ressource durable d’avenir – Edition des Techniques de l’Ingénieur. 6 Janvier 2019.